« Se faire vacciner, c’est aussi accélérer l’accès à la vaccination pour les autres »

Ce contenu a été publié sous le gouvernement du Premier ministre, Jean Castex.

Publié 07/05/2021

Comment sont surveillés les vaccins ? Décryptage avec le Dr Christelle Ratignier-Carbonneil, directrice générale de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).

Avant d’être autorisés, les quatre vaccins actuellement commercialisés en France contre la Covid-19, ont été soumis à un parcours strict. pouvez-vous nous le décrire ?

En effet, ces quatre vaccins ont suivi un parcours éminemment rigoureux , comme tout médicament. Pour être commercialisés et accessibles en France, les vaccins - qui sont des médicaments dit « immunologiques » - doivent bénéficier d'une Autorisation de mise sur le marché . Autrement dit, avant toute utilisation, on contrôle, vérifie et regarde pour chaque vaccin sa qualité, son efficacité et sa sécurité. Cette Autorisation de mise sur le marché passe obligatoirement par l' Agence européenne du médicament (EMA) viaune procédure dite « centralisée », parce qu'elle concerne l'ensemble des États membres . L'industriel dépose une demande d'Autorisation de mise sur le marché qui est soumise à une évaluation stricte. À l’issue de cette dernière, soit le laboratoire obtient le sésame pour les 27 É tats membres, soit il ne l'a pas. Dans ce second cas, le vaccin ne pourra alors pas être distribué dans l'Union européenne.
Le développement du vaccin
Le développement du vaccin / Infographie : Service d'information du Gouvernement

Infographie - Garantir la sûreté des vaccins en France

L'évaluation du vaccin 1
L'évaluation du vaccin 1 / Infographie : Service d'information du Gouvernement
L'évaluation du vaccin 2
L'évaluation du vaccin 2 / Infographie : Service d'information du Gouvernement
La surveillance du vaccin
La surveillance du vaccin / Infographie : Service d'information du Gouvernement

Quel rôle joue l’agence nationale de sécurité du médicament (ansm) dans ce parcours ?

L'Agence européenne du médicament (EMA) coordonne les évaluations des vaccins réalisées par les 27 agences sanitaires nationales, dont l' ANSM . Pour chaque demande de mise sur le marché, deux États chefs de file sont désignés : un rapporteur et un co-rapporteur . Ces deux agences nationales font la majorité du travail : elles inspectent les usines et analysent toutes les données (qualité, précliniques, cliniques…) soumises par le laboratoire. Par exemple, pour les vaccins contre la Covid-19, les essais cliniques de phase 3 ( sur des hommes en bonne santé, NDLR ) ont été réalisés sur environ 40 000 personnes : 20 000 ont reçu le vaccin, 20 000 autres un placebo. Ce quantum de données biologiques et cliniques collectées est analysé, patient par patient. C'est donc forcément une quantité de données extrêmement importante.

En quoi la crise sanitaire a-t-elle impacté ce processus ?

L'EMA a mis en place, compte tenu de la situation d'urgence, une « rolling review », soit une évaluation continue des données au fur et à mesure que les résultats des études sont disponibles. Normalement, hors Covid-19, l'industriel attend d'avoir l'entièreté de toutes les données (qualité, efficacité, sécurité) pour déposer une demande de mise sur le marché complète. La « rolling review » permet de gagner un temps précieux sans, bien évidemment, renier la qualité et la sécurité en termes d'évaluation des vaccins. Dès que des données sur la qualité pharmaceutique sont recueillies, elles sont soumises aux autorités compétentes et évaluées. Pareil pour la préclinique et la clinique. Ce système permet de réduire les délais, mais l'analyse, elle, reste aussi fine et rigoureuse qu'en temps normal. C'est pour cette raison que des Autorisations de mise sur le marché ont été délivrées pour les vaccins contre la Covid-19 en trois mois , dès que les informations fournies par les industriels étaient assez robustes.

L'ansm a-t-elle des spécificités par rapport aux autres agences nationales ?

Absolument, car pour la mise à disposition des vaccins dans l'Union européenne, et a fortiori sur le territoire français, les vaccins doivent être « libérés ». On dit qu’il doit y avoir une « libération de lots ». Chaque lot qui est mis en distribution dans l'Union européenne doit avoir fait l'objet d'un double contrôle effectué par un laboratoire de contrôle officiel indépendant, comme l'ANSM , très présente dans la libération des vaccins, notamment anti-Covid. Toutes les agences n'ont pas ce statut. Mais, il existe une reconnaissance mutuelle des agences : un lot autorisé à être utilisé en France, l’est aussi dans les autres pays européens, et inversement.

En quoi consiste ce contrôle parallèle ?

Concrètement, en tant que laboratoire de contrôle officiel indépendant, l'ANSM – et les autres laboratoires de contrôle officiels indépendants - reçoit, pour chaque lot de vaccin, des échantillons et effectue des contrôles (substance active, stérilité, concentration…). Il s’agit à proprement parler d’une analyse scientifique, avec des laboratoires, des blouses blanches et des paillasses !

Que se passe-t-il après l'obtention de l'autorisation de mise sur le marché (amm) ?

L’AMM est délivrée avec un résumé des caractéristiques du produit et une notice validée par la Commission européenne. Vient ensuite l’étape de la Haute autorité de santé (HAS), au niveau français . C'est elle qui détermine la place de chaque vaccin dans la stratégie vaccinale . Après ces différents feux verts, le vaccin est disponible sur le territoire national.

La surveillance n’est pas terminée pour autant…

Au contraire. L'Autorisation de mise sur le marché n'est que le début , la porte qui s'ouvre pour l'utilisation et la surveillance. Comme tous les médicaments, on surveille les effets indésirables des vaccins en continu et les autorités compétentes s’adaptent à l’évolution des connaissances et de l’utilisation du vaccin dans la vie quotidienne. La vaccination contre la Covid-19 étant mondiale, on acquiert par conséquent énormément de données extrêmement précieuses.
Au moment des essais cliniques, on a évalué la qualité et l'efficacité des vaccins. Pour autant, peuvent survenir des effets indésirables rares (moins de 1/1000) ou retardés.

Comment s’articule cette surveillance une fois la vaccination commencée ?

En France, on a mis en place un double dispositif de surveillance des vaccins contre la Covid-19 . D'un côté, on a la pharmacovigilance . Elle s'appuie sur un réseau de 31 centres régionaux de pharmacovigilance qui recueillent les signalements spontanés des professionnels de santé, des personnes vaccinées mais aussi de leur entourage. Ces déclarations permettent de détecter les effets indésirables inattendus, retardés ou connus, mais dont la fréquence peut être supérieure à celle relevée au moment des essais cliniques. Le dispositif complémentaire est la pharmaco-épidémiologie pilotée par le Groupement d'intérêt scientifique EPI-PHARE (association de l’ANSM et de la CNAM). Ce dispositif consiste à étudier les données avec une quantification de survenue des risques indésirables au niveau de l'ensemble de la population ciblée par la vaccination. Avec ce système, on suit la fréquence des consultations (hôpital, médecin généraliste, ambulatoire...), des soins, la consommation de médicaments, et on compare par exemple de manière exhaustive l'évolution de la population vaccinée versus la population non vaccinée. Bien sûr, ces deux dimensions - pharmacovigilance et pharmaco-épidémiologie - échangent en permanence puisque l'une se nourrit de l'autre, et réciproquement. Cette circularité de l'information est vraie aussi avec l'Europe.

Et si des effets indésirables sont constatés ?

Dans ce cas-là, l’agence peut décider de la mise en place de « mesures de réduction du risque » adaptées, allant des contre-indications pour certaines populations, des messages d'information renforcés ou possiblement, dans les cas extrêmes, des retraits d'autorisation.

Que diriez-vous à une personne réticente à l'idée de se faire vacciner à l’astrazeneca ?

3 raisons de se faire vacciner contre la Covid-19
La situation est très simple : le virus tue, les vaccins sauvent des vies . Lorsqu'on a plus de 55 ans, le risque de faire une Covid sévère est extrêmement plus important que le risque de faire un événement thrombotique rare. Il y a donc beaucoup plus de risques à attendre et à ne pas se faire vacciner, que de risques de développer une thrombose atypique avec le vaccin AstraZeneca. À plus de 55 ans, il faut aller se faire vacciner, et tout de suite, avec AstraZeneca ou Janssen car c'est un bénéfice individuel indéniable, mais aussi collectif. Se faire vacciner le plus vite possible, c'est permettre d'accélérer la vaccination pour les autres populations et être fier de permettre à ses enfants ou petits-enfants d'avoir accès à la vaccination le plus rapidement . N’oublions pas que la vaccination est l'outil qui nous permet de voir la lumière au bout du tunnel.

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